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Day 0

Je m'appelle Damien. Je bosse comme AESH dans un EREA. Ça veut dire que j'essaye d'aider des gamins en difficultés (handicap moteur, trouble de la fonction cognitive etc.) à suivre leurs cours. Je reformule les consignes pour qu'ils les comprennent mieux. Je les aide à organiser leur espace de travail, à y voir « plus clair » pour qu'ils puissent suivre les cours et répondre aux questions auxquelles, le plus souvent, ils ont la réponse. Mais la réponse... elle sort pas toute seule, donc je suis là.

Me décrire en quatre phrases ?

J'ai 46 ans et ça se voit. Je perds mes cheveux et j'en rajoute une couche en passant à la tondeuse sans sabot.

Je me maintiens en forme autant que possible. Quand c'est ouvert, je vais à la piscine deux à trois fois par semaine et y enchaîne 80 longueurs en environ une heure. Sinon, c'est 2 à 3 heures de musculation à la maison. J'ai un banc, des poids...

Il me faut ça car je suis... très gourmand. Avant, j'étais tout autant sur le salé que le sucré. Mais depuis que je surveille mon alimentation et notamment ma consommation de sucre, la balance de mes tentations penche définitivement en faveur du sucré.

Et sinon, j'aime lire... un peu de tout. En fiction, ce sera surtout du « fantastique », de la SF et de l'horreur. Sinon, j'alterne avec des ouvrages de philosophie, de sciences humaines et d'astrophysique.

Qui a récemment tenté de m'aider et comment je l'ai repoussé ? Je dévie un peu la question et recadre dans le milieu pro. Je crois que le dernier à avoir voulu m'aider est celui sensé coordonner mon activité et celle de ma collègue AESH. Mais je le soupçonne de m'avoir proposé son aide pour mieux me manipuler. C'est un menteur, un manipulateur. C'est quelqu'un qui adore la réunionite, le langage « officiel » et consensuel et... le sentiment de « tirer les ficelles ». Aussi, je m'en méfie... surtout depuis qu'il a voulut se servir de moi pour régler ses comptes avec un enseignant. Bref, je l'ai poliment repoussé, très poliment même et... je l'évite autant que possible.

Enfin, je vis à Nantes et les bois où je vais ? Mes bois intérieurs évidemment ! La forêt de Millevaux !


Return Question (sur vous-même, pas votre personnage) : De qui avez-vous accepté de l’aide récemment, et comment vous ont-ils aidé ?

Personne ne m'a proposé de l'aide récemment...


Day 1

La joie serait plus difficile à éprouver ces temps-ci ? Je ne sais pas. Disons qu'elle se manifeste différemment d'avant. Pourquoi ? Parce que je m'isole. Pourquoi je m'isole ? Parce que je ne me sens plus bien avec les autres. Je m'ennuies. Je perds mon temps. Avant, j'aimais ça, être entouré, avoir du monde autour de moi. C'est passé. Plus le temps passe et plus je me sens différent. Je trouve dommage de ne plus pouvoir partager de chose avec les autres mais... ce n'est plus possible. Même rire, ce n'est plus possible. Depuis combien de temps je ne me suis pas laissé aller à un vrai fou-rire ? Je ne suis pas triste en soi. Déçu ? Même pas sûr. C'est juste que je constate... j'ai l'impression que l'humanité et moi suivant maintenant des chemins très différents et qui s'éloignent chaque jour un peu plus. Nous ne nous comprenons plus. Finalement, ce n'est peut-être pas la joie qui esr difficile à éprouver, c'est juste qu'elle ne se manifeste plus comme avant. Mais en vrai, suis-je vraiment si malheureux que certains veulent le croire ?

En fait, mes questionnements, mon isolement, ma réserve ne sont pas synonyme de tristesse. Tout cela est plutôt la conséquence et la forme que prend ma distanciation par rapport aux autres. Mais quand je vois le chemin que prend l'humanité en général et ma société, ma culture en particulier, je suis en fait plutôt content de prendre une autre voie... même si je ris moins et moins fort qu'avant.

Et les jours qui raccourcissent ? C'est vrai qu'avec l'âge je suis plus sensibles à ces considérations météorologiques. En fait, ce n'est pas tant que les jours soient plus courts qui m'attriste que... la pluie. Je ne supporte plus la pluie.


Ce jeu suppose que je sais dessiné et laisse entendre que, plus jeune, j'aurais été dans des bois pour y dessiner. Mais, avec le temps, j'aurais consacré moins de temps à cette activité. J'aurais dessiné moins souvent, moins bien. Et ces bois ne seraient aujourd'hui plus les miens.

Si j'avais crée un personnage fictif, cela aurait peut-être été plus facile d'imaginer ou mettre en scène une telle situation mais... j'ai choisi de me jouer moi-même et je n'ai jamais su dessiner. Je n'en ai même jamais vraiment eu envie. En fait, je gribouillais dans la marge de mes cahiers, comme je le fais encore sur des feuilles volantes pendant les réunions au boulot. En fait, si j'avais dû dessiner, j'aurais voulu peindre. Faire des trucs abstraits à la limite du monochrome. Un jour, faudrait que je me lance... ou des collages aussi, peut-être...


Les jours vont maintenant aller en s'allongeant. Je suis sensé en éprouver une certaine joie, ressentir l'assurance que les choses vont aller vers du mieux. Et pourtant, ce n'est pas le cas. Le jeu m'invite dans ces bois qui furent les miens et qui, pourtant, n'ont jamais existé. Je n'ai jamais eu de « bois à moi », de lieu à moi, de sanctuaire, de repaire, d'espace à moi. Alors, quels sont mes bois aujourd'hui ? Je pense à la forêt de Millevaux qui fut le théâtre de bien des parties de jeu de rôle en solitaire. Pourquoi je me suis autant investi dans cet univers ? Parce qu'il est lovecraftien ? Parce qu'il offre la perspective de jouer du post-apo ailleurs que dans un désert à la Mad Max ? Parce que j'apprécie la démarche de créateur de Thomas Munier et que n'ayant pas les moyens de le soutenir financièrement je le fais en jouant, en « faisant vivre » modestement ses jeux et son univers ?

Lovecraft ! Millevaux est lié à Shub-Niggurath. Dans le mythe, j'ai une préférence pour Chtulhu, évidemment, et Nyarlatothep. Pourtant, Shub-Niggurath a finalement trouvé sa place chez moi parce qu'elle est la Chèvre Noire des Bois au Milles Chevreaux, parce qu'elle est la mère... la mauvaise mère... A la mer, je préfère la montagne...

Et je me rappelle maintenant qu'à une époque je prenais plaisir à dessiner des « arbres-fantômes », monstres halloweenesques sans feuilles mais aux regard maléfique et à la gueule pleine de dents acérées...


C'est drôle car le jeu suppose que je ne suis plus « connecté » à quoi que ce soit de cette forêt qui fut mon sanctuaire. Au contraire, il évoque une grotte qui serait étrangement un endroit nouveau pour moi, un endroit où je me sentirais bien. Mais, le rêve le plus ancien dont je me rappelle est la conséquence de la visite d'une grotte, justement, quand j'étais petit. En fait de rêve, c'était un cauchemar avec un dinosaure. Mais cela m'a marqué car, non seulement je m'en rappelle encore mais ce rêve avait conditionné ma passion d'enfant pour la préhistoire. Plus de trente plus tard, je suis retourné visiter cette grotte, à Sarre. Elle ne ressemblait en rien à ce dont je me rappelais. Mais elle était quand même très belle.

Ainsi, si les bois ne sont plus, peut-être parce que, liés à la mère, ils ne l'ont jamais été, un sanctuaire pour moi, les grottes, elles, le seraient...

Qu'est-ce qui me dérange ? Faire ce constat ou ne pas savoir ce que je vais en faire ? Déjà, à peine ce jeu commencé, je me demande si je vais vraiment le publier.


Return Question : Qu’est-ce qui vous apporte de la joie ? Quand vous sentez-vous le plus connecté au monde ?

J'éprouve de la joie quand je fais mon petit sport quotidien. En ce moment, ce sont presque 3 heures de musculation par jour et ça me remplit de joie ! À cela, j'ajoute mes jeux de rôle en solo, surtout quand l'histoire prend des direction imprévues qui me donnent envie de creuser ces questions, cet univers. Mais surtout, ce qui me procure de la joie, c'est la lecture. Il peut s'agir d'une fiction intéressante, agréable à lire voire source de réflexions. Il peut aussi s'agir d'un bouquin « sérieux » qui me fait vraiment réfléchir. Et quand bien même le constat quant à l'état du monde est alarmant, je suis plein de joie d'en apprendre un peu plus, de me coucher moins bête que je ne me suis levé.


Day 2

Et ce moment où j'émerge au bord d'une falaise. Ce n'est pas celle-là mais ça me rappelle la pointe de St-Barbe à St-Jean-de-Luz. C'est un joli coin. De là, on a un beau point de vue à la fois sur la mer et la montagne. Mais ce n'est pas là que je suis. Ce coin n'est pas Millevaux non plus car je ne suis pas en train de jouer. En vérité, je ne sais pas où je suis. Ce n'est ni la réalité, ni un rêve, ni une partie de jeu de rôle. Et ma cheville me fait souffrir. Pas au point de ne plus pouvoir marcher mais j'ai quand même mal. Et ça me rappelle ces fois où, sans savoir ni comment ni pourquoi, j'avais tellement mal à la cheville que je pouvais à peine marcher. Pourtant, je pouvais nager et grimper sans problème...

Et le jeu me demande ce que ça fait de ne pas savoir partir... Je ne sais pas. Ce n'est pas pareil que de ne pas savoir quand il faut partir. Des fois, on peut se planter, ne pas saisir qu'on est de trop et qu'on devrait partir. Ou ne pas comprendre qu'on a tiré le meilleur de l'instant présent et qu'il vaut mieux partir maintenant car tout ce qui arriverait ne saurait être meilleur... En fait, ça me fait penser que, des fois, un moment pourrait être tellement bien que ça vaudrait presque le coup de mourir juste après. Pour partir sur une bonne impression... Alors, est-ce que c'est ça « ne pas savoir partir » ? Est-ce que ce serait « ne pas savoir mourir au bon moment » ? Et qu'est-ce que ça fait ? En vérité, cela ne me rend pas triste. Ce jeu a pour thème la dépression et en y réfléchissant je me sens bien, finalement...

Le jeu décrit un ruisseau que le personnage-joueur suit afin de ne pas se perdre. Il dit que cette « astuce » lui a été enseigné mais demande par qui et ce que cet « autre » lui a appris d'autre. Et là, je ne sais pas quoi répondre. Ce sera idiot de dire que personne ne m'a rien appris, que je ne dois rien à personne mais... ma mémoire doit me jouer des tours car je ne me rappelle de rien. Est-ce là un effet de Millevaux ? Dans cet/son univers, Thomas Munier explique comment la forêt exerce son influence néfaste sur ceux qui l'habitent et comment ces derniers perdent rapidement la mémoire. Est-ce que ne pas être fichu de me rappeler quoi que ce soit pour répondre à cette question serait un effet de « mon » Millevaux ? Je ne perds pas la mémoire mais... il y a des choses que j'ai oublié. J'ai coutume de dire que mon cerveau à « virer des souvenirs » pour faire de la place pour de nouvelles connaissances tirées des livres. Finalement, mon cerveau serait comme un disque dur. Il faut virer des fichiers, des fois, pour en mettre des nouveaux. Pourtant, dans un disque dur, il paraît que rien ne disparaît vraiment et qu'on peut toujours faire remonter à la surface un vieux fichier effacé. Psychanalyse de mon disque dur ? Mais toujours est-il que je suis incapable de répondre à cette question de savoir « qui » m'a enseigné quel « truc » ?

Cela doit venir de ce que je ne lis pas très bien l'anglais mais... j'ai du mal à me représenter le décor que plante le jeu. Il parle de lumière et d'obscurité. J'ai l'impression que cette partie du jeu se passe en pleine nuit mais, pour moi, ce sont des images de pleine journée qui s'imposent. Je dois mal comprendre quelque chose. Ou alors, comment peut-on être dans le noir en plein jour ? On dirait que je suis sorti de cette caverne puisque je suis ce petit cours d'eau. Et je ne suis en plein air puisque je peux y voir les nuages se refléter. Dans le noir en plein jour. Dans le brouillard... Dans le tunnel avec la lumière au bout. Mais quelle lumière ? Est-ce que c'est l'espoir de la sortie, de la fin des emmerdes ou est-ce que c'est la fameuse lumière qu'on voit au bout du tunnel quand on meurt ? Et du coup, ce petit cours d'eau, Styx ou Léthé ou les deux ? En tout cas, que ce soit ou non le véritable propos de ce jeu, je suis face aux questions de la mort et de la mémoire. Il y a des choses que j'ai oublié. Et il y a la mort... Des proches sont morts. Des membres de ma famille, mon père en fait. Des amis, potes de lycée et de fac. Est-ce que mon Millevaux personnel a pour but de me faire « oublier » certaines choses à propos de ces morts ? Est-ce que c'est cet oubli qui me permet d'avancer, de continuer à suivre le courant de ce petit cours d'eau. Et si, ce cours d'eau, était un peu comme le Tao, le courant, le flux que je laisse m'entraîner sans chercher à lui résister... vers où ?

Et quels sont ces nuages dont les reflets me hante(raie)nt. Est-ce que ce sont ces morts justement ? À quel point tout cela m'a marqué ? Plus que je ne l'imagine ? Ou alors, pas tout à fait ou pas seulement comme je l'imagine... Suis-je « marqué » par la mort à laquelle j'ai été confronté trop jeune, plusieurs fois et en peu de temps ? Peut-être mais... cette marque est-elle nécessairement négative ou uniquement négative ? L'arcane majeure du même nom n'a pas qu'un sens négatif.

Alors, si je suis « hanté » par quelque chose, que ce soit la mort ou ces souvenirs que j'ai oubliés, enterrés dans mon Millevaux personnel, est-ce si mauvais que ça ?


Return Question : Trouvez quelque chose de beau et regardez-le pendant une minute ou deux. Qu’est-ce que vous trouvez le plus beau à ce sujet ?

Bah merde alors ! Là, je suis devant mon PC et le truc le plus beau que j'ai sous les yeux c'est... la lava lampe !! Je l'ai laissé allumée assez longtemps pour que la cire commence à chauffer mais pas assez pour que ça fasse des bulles. Du coup, j'ai une espèce de Shoggoth ou de fœtus d'alien (au choix!) dans ma lampe et.. je trouve ça beau !


Day 3

Et je continue mon petit bonhomme de chemin à côté de ce cours d'eau. La nuit est tombée. Il fait sombre mais mes yeux s'y sont habitués. Je scrute les arbres et quelque chose me turlupine. J'ai repensé à Millevaux, à mon intérêt pour cette vision du Mythe, pour certains de ses aspects comme le rapport à la mémoire qui s'en va, que Millevaux, la mauvaise mère, nous vole... et les arbres... J'ai repensé à ces mots prononcé par mon médecin traitant quand j'étais ado. C'était bien avant la mort de mon père et déjà, il m'avait dit qu'on ne pouvait pas vivre sans racines. Par provocation, j'avais répondu que si mais, soyons franc, à l'époque je ne comprenais pas ce qu'il voulait dire, ce que ça venait faire là-dedans. Est-ce que je comprends vraiment aujourd'hui ? Pas sûr mais... peut-être qu'effectivement je vis sans racines ou je « me » vis sans racines. Et Millevaux est plein de racines. Millevaux, fascinante et maléfique. Les racines, « mes » racines, seraient fascinantes et maléfiques et... oubliées ? Dois-je comprendre qu'il y a quelque chose de pourri concernant mes racines, que j'aurais oublié ? Mais dois-je vraiment m'en rappeler ou dois-je plutôt m'en moquer et continuer ma route, dans le noir, le long de ce cours d'eau ? Tout ça n'est pas encore très clair mais je comprends que mon intérêt pour Millevaux n'est peut-être pas uniquement ludique. Et je comprends aussi que ma vie me rend heureux même si « la lumière n'est jamais vraiment complète » !


Et le cours d'eau devient de plus en plus petit. Il finit par disparaître, aboutissant dans un gigantesque marécage puant. C'est énorme en comparaison de la taille du cours d'eau qui s'y jette ! La surface est recouverte de plantes en décomposition. Ça pue ! Et on ne voit pas le fond ! Et c'est dans cette fosse sceptique que ce jette le courant qui m'a guidé jusque là ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut forcément dire quelque chose. À première vue, c'est négatif, ça sent mauvais mais... il ne tient qu'à moi qu'il y ait là quelque chose d'intéressant à découvrir, matière à réflexion...


Et le jeu me propose de trouver un endroit sec où me reposer. Dormir là, certes au sec mais juste à côté de ce marais puant ?! Depuis le début, je n'ai pas vu le moindre animal dans ces bois. Et si quelque chose devait sortir du marais pendant que je dors ?

C'est drôle car en ce moment je dors très mal. En fait, pas tout à fait. Mon sommeil est plutôt bon en soi. C'est juste que je dors très peu et en total décalage avec la norme sociale et même un rythme circadien normal. J'en profite pour « faire des trucs », mettre ce temps de veille à profit. Et dans le jeu, alors même que les conditions pour que je dorme sont loin d'être réunies, je 'écroule de fatigue... enfin ?


Return Question :Pensez à un endroit qui vous fait vous sentir en sécurité. Qu’en est-il de cet endroit vous fait vous sentir si en sécurité ?

Chez moi, évidemment ! Mon chez moi où personne d'autre que moi ne peut rentrer. Je reçois très peu. Quasiment jamais. Chez moi, c'est chez moi ! C'est MON espace. Le jeu m'y a refait penser quelques jours plus tôt mais, chez moi, dans ma « famille », je n'ai finalement jamais eu d'espace à moi, ou d'espace qui aurait été considéré et respecté comme tel. Chez moi, ce qui était à mon frère était à mon frère et ce qui était à moi était à mon frère aussi. Je n'avais rien, pas d'espace propre en tout cas. De là à dire que je n'étais rien... En tout cas, il m’apparaît clairement que, si elle a essayé, ma famille a complètement échoué à me faire sentir que j'étais quelqu'un ou, en tout cas, autre chose qu'une... chose dont on pouvait disposer à sa guise... Et malgré tout, si je suis celui que je suis aujourd'hui et si cette personne me plaît, que je ne veux pas être quelqu'un d'autre... c'est aussi, précisément ?, en raison de cet état de fait.


Day 4

J'émerge sans émerger car je suis déjà réveillé... depuis longtemps. Mais je suis réveillé, pourtant, par un cri. Je suis dans mon salon, la lumière allumé mais je suis aussi dans les bois, dans le noir. Il fait à ce point noir, dans ces bois, mes bois ?, que j'en arrive à me demander s'il a seulement déjà fait jour ici...

Et il y a ce cri... Toutes 15 secondes...

Je tape sur mon clavier que je marche dans ces sous-bois à la végétation pourrie, remontant la piste de ce cri perçant jusqu'à un arbre que je devine mort puisqu'il n'a aucune feuille. Sur une branche, ce truc que je n'ose pas vraiment appeler un oiseau.

Ça ressemble à un oiseau puisque ça a des ailes et un bec. C'est noir comme un corbeau et ça pousse le même genre de cri mais... en réalité, c'est un mélange de bonhomme vêtu d'un costume noir, un long manteau noir, et d'oiseau. Et ça cri dans ma direction même si rien n'indique, pour l'instant, qu'il a vraiment remarqué ma présence. Après tout, il fait nuit pour lui aussi.


Cette nuit encore j'ai très peu dormi et je repense de plus en souvent à Fight Club. C'est un peu comme ça que tout commence. Norton, enfin... son personnage, est insomniaque et, peu à peu, il perd pied et... Tyler Durden apparaît. Est-ce que Tyler Durden va venir pour moi ? Est-ce que mon appartement va exploser et réduire tout ce que je possède en cendres et poussières ? Est-ce que ce serait vraiment grave ?

J'ai besoin de dormir mais je ne sais pas ou plus si ce besoin est physique, moral ou seulement social. Ai-je envie de dormir parce que je suis crevé ? Ai-je envie de dormir seulement parce que tout le monde le fait ? Et si je continuais juste à profiter de ce temps pour faire des trucs qui me plaisent comme lire, mon petit sport quotidien... Mais sous l’œil de cet homme-oiseau qui ne semble pas me voir, dans ce sous-bois pourri, je cherche quand même de quoi me faire un abri et... je ne trouve rien ! Est-ce seulement un manque d'imagination de ma part ou est-ce que cela a un sens plus profond ? Je ne trouve rien car je n'ai nul part à m'abriter... et peut-être aussi car, finalement, je n'ai pas besoin d'un abri ?

Je m'habitue au cri de cet homme-oiseau. Toutes 15 secondes... ça ne me dérange pas. Alors, je m'allonge au pied de l'arbre, juste en dessous de la branche sur laquelle il est juché. Et il ne semble toujours pas avoir capté ma présence. J'aurais pu (voulu?) dire qu'il veille sur moi mais ce n'est pas le cas. Il est juste là et il fait son truc, mécanique, toutes les 15 secondes. Et moi, je trouve là un abri qui n'en est pas un...

Je m'allonge et, pour de faux, je dors.


Return Question : Quel est le son qui vous réconforte ? Si vous pouvez l’entendre maintenant, faites-le. Sinon, pensez à la la dernière fois que vous l'avez entendu. ?

Un son qui me réconforte... Là, je vois pas ! Je ne « vois » pas de « son » qui me réconforte. L'idée même ne me « parle » pas.


Day 5

Dire que j'ai mal dormi est un euphémisme. Entre mes excès de glucose de noël et mes 4h de musculation par jour depuis le début des vacances, la machine a dit « stop ! » et je me suis écroulé comme une vieille merde. Une très mauvaise nuit donc à laquelle à succédé une fatigue d'une telle intensité qu'après ma première séance de sport... j'ai été me recouché. Mais pas tout seul ! Une migraine carabinée est venu avec moi et est restée là pendant presque 24h ! J'ai cru que j'avais le covid tellement j'étais mal. Ce matin, ça va mieux, même si je me sens encore tout faible. Il va me falloir un jour ou deux, je pense, avant d'avoir vraiment récupéré et pouvoir recommencer le sport. Fait chier. Je suis tellement crevé que je me sens à peine la force de faire mes solos, c'est dire...

Alors, comment comprendre le Jeu quand il dit que je reprends ma route en quête d'un nouveau « courant » à suivre ? Qu'est-ce que ça veut dire, le terrain tellement inégal que je dois faire attention en marchant ? Le Jeu dit aussi que l'espèce d'oiseau a disparu. Ça, je crois que c'est juste parce qu'il m'a cru mort ! Et pour le reste, est-ce que je dois comprendre quelque chose ? Certainement ! Le « terrain inégal », c'est drôle car, comme je me sens encore bien faible, j'ai du mal à marcher. Je souris mais... ce sera mieux quand j'aurais vraiment et complètement récupéré. Et je me dis que quand ce sera le cas, il faudrait que j'en fasse un peu moins, que je tire un peu moins sur la corde. Que je fasse « autrement » en tout cas... mais il y a quand même de grandes chances que je reprenne comme avant... jusqu'à ce que ça casse à nouveau...

Le Jeu évoque des plantes qui m'empêchent de bien voir où je vais. Quelles sont ces plantes qui me forcent à aller au ralenti ? Je ne sais pas s'il existe une plante symbolisant l'ignorance mais je crois que c'est celle-ci qui me force à aller au ralenti. Si je suis tout faiblard aujourd'hui, c'est (peut-être ?) tout simplement parce que j'ignore comme (bien) faire autrement.


Un rocher dans la boue ! Il y a des trucs gravés en bas, qui en font tout le tour. Ces symboles n'ont aucun sens car... je ne connais pas cette « langue ». Ce n'est pas vraiment une langue. Un code ? En tous les cas, c'est forcément quelque chose d'occulte et d'ésotérique, dans la grande tradition du mythe lovecraftien. Il ne peut en être autrement. C'est à la fois intéressant et frustrant. Intéressant car toutes ces choses là m'intéressent, mais frustrant car j'aimerais bien percer tous ces mystères. Et ce rocher est doublement frustrant car il me fait évidemment pensé à mes années d'escalade. Ça fait plus de 3 ans maintenant que je n'ai pas touché une prise et... ça me manque. Mais le contexte ne se prête pas vraiment à une reprise. Et si je devais reprendre, je veux « faire ça bien » ! Donc, si je dois reprendre... et bien, ça attendra...


C'est drôle que le Jeu parle de « mes membres pris dans la boue ». Est-ce comme ça que je me sens après cette « journée morte » ? Et celle-ci ne s'annonce pas très vivante non plus. Je sens que je vais me traîner toute la journée comme une loque, que je ne vais rien faire de bon. J'ai beau savoir que ça ne durera pas, que dès demain, après-demain au pire, ça ira bien, j'ai quand même la sensation que ça durera toujours ou trop longtemps an tout cas. En fait, c'est ce qui m'embête le plus là-dedans, cette impression de perdre du temps, d'avoir des choses à faire – pour moi ! – et de ne pas pouvoir m'y consacrer. Après, pourtant, ce n'est pas grave. Il n'y a rien d'indispensable ni de vital dans le fait de ne pas faire d'exercice pendant un jour ou deux, de ne pas faire mes rps pendant un jour ou deux. Mais quand même... ça fait chier ! Sensation d'être faiblard, de perdre du temps...


Return Question : Pensez à une découverte passionnante que vous avez faite dans votre propre vie récemment. Qu’est-ce qui a fait que découverte si excitant ?

Ce n'est pas vraiment une découverte mais, cette année, j'aurais pas mal lu sur la « société de consommation » et comment ceux qui nous gouvernent nous la font à l'envers... avec notre propre complicité ; jouant sur notre matérialisme, la peur de perdre un peu de notre petit confort, de devoir renoncer au superflu d'une 3è télé ou d'un 5è smartphone. Cela, vu le contexte de pandémie et tout le tralala, m'aura donné à réfléchir notamment sur la notion et la nature de la Liberté. Qu'est-ce que c'est finalement la Liberté ? C'est quoi être libre ? Donc, pas forcément une découverte dans le sens où je n'ai pas attendu 2020 pour me poser ces questions mais intéressant quand même dans la mesure où ces lectures et ce contexte « historique » auront donné un éclairage nouveau à mes petites réflexions. Et il m’apparaît, triste constat, que de plus en plus ce « groupe humain » sans lequel il m'est impossible de vivre soit devenu mon pire ennemi...


Day 6

Alors que je récupère un peu et me dis que dès demain je pourrais me remettre au sport (je suis ultra raisonnable et compte quand même attendre jusqu'à demain) je suis de nouveau réveillé par un cri d'animal dans mon « Millevaux intérieur ». Mais rien à voir avec le « son » régulier de l'homme-oiseau de la dernière fois. Là c'est toujours un oiseau mais quand je le trouve enfin, je tombe sur un pauvre petit animal aux ailes brisées, tordues et... ce n'est malheureusement pas le pire. L'oiseau, noir, est littéralement explosé ! Les tripes à l'air, c'est dégueulasse ! Et pourtant, il n'est pas mort. Je dirais même qu'il ne meurt pas. Pourquoi ? Dans cet état, il devrait être mort depuis longtemps.

L'oiseau me fixe de ses yeux pas encore morts mais presque. Il y a quelque chose dans son regard de... inhumain n'est pas le bon mot justement. Là, c'est plutôt étonnement humain... in-animal alors ? J'aimerais, sans savoir pourquoi, pouvoir dire que cet oiseau m'attendait. Mais pourquoi ? Pourquoi j'aimerais ça ? Ça me ferait me sentir « important » ? Pourquoi il m'attendrait ? Pour que je l'aide ? À en finir ? Il n'y a plus rien à faire pour lui maintenant. Mais comme tout est métaphore dans mon « Millevaux intérieur », que dois-je comprendre, de quoi je dois me rappeler ? Il n'y a pas de hasard ici. Si ce piaf est là, il y a une raison et je dois faire quelque chose. Sauf que... je ne sais pas quoi. Je ne peux pas l'aider. Je ne peux pas le guérir et je ne peux pas l'achever non car... c'est vraiment dégueulasse ! Pas dégueulasse moralement. C'est juste que je ne veux pas m'en foutre partout. Et ça, est-ce que ça ne voudrait pas dire quelque chose ? En vrai, je m'en foutrais du sort de l'oiseau, quoi ou qui qu'il représente, l'important pour moi serait, tel un Ponce Pilate des temps modernes, de garder les mains propres ?

Et pourtant, parce que c'est un jeu, parce que c'est un rêve, je ramène le piaf dans mon refuge. Je me « salis les mains » pour quelqu'un ou quelque chose que je sais ne pas pouvoir sauver.

Une fois dans mon « refuge » – et là je me demande comment je peux vraiment considérer mon « Millevaux intérieur » comme un refuge – non !, j'ai un refuge à l'intérieur de mon Millevaux. C'est plutôt ça. Enfin, quoi qu'il en soit, il faut nourrir cet oiseau. Et là, je me rends compte que je n'ai pas mangé depuis... dans la réalité, malade, je n'ai rien avalé pendant 24h. Là, dans le rêve ludique, ça fait presque une semaine. Et c'est presque drôle quand on sait combien je suis gourmand. Les nourritures intellectuelles et spirituelles c'est bien, mais ça fait pas tout ! Ça vaut pas un bon gâteau basque en tout cas !

Et comme c'est un rêve, un rêve ludique ou un jeu onirique, c'est du gâteau basque que je trouve à ce piaf. Mais même si c'est un jeu, même si c'est un rêve, je sais que l'oiseau va mourir. Car … il est une métaphore de je ne sais quoi que j'ai trouvé explosé dans les bois de la Mauvaise Mère et que j'ai nourri du gâteau de mon pays d'origine mais que je connais finalement si mal. Non, je n'ai rien oublié car, n'y ayant jamais vécu, je n'ai pas eu l'occasion de m'y faire des souvenirs que j'aurais pu oublier. Et si les racines de Millevaux, ces racines oubliées, me « parlaient » aussi parce que j'aurais le sentiments de ne pas en avoir justement... des racines. Et pas seulement parce que ma famille... bref...

Le piaf va crever et je dors mal.


Return Question : Qui avez-vous récemment aidé, et comment l'avez-vous aidés? ?

Je ne sais pas si je l'ai vraiment aidé ou si cela sera pérenne mais je pense à une élève à qui j'ai redonné le sourire l'espace d'un instant. C'est quelqu'un qui a très peu confiance en elle, de trsè refermée et vraiment pas gaie. Je ne sais plus à quelle occasion mais je lui dis que moi aussi, parfois, souvent, j'avais l'impression de pas servir à grand chose ou de faire de la merde. Puis je lui ai dit qu'après tout il y avait quand même vachement de gens qui faisaient de la merde et qui, eux, étaient vachement fiers de leur merde justement. Alors, pourquoi nous on devrait plus se prendre la tête qu'eux ? Et là, derrière le masque, ou juste dans les yeux, j'ai vu (cru voir) un sourire.


Day 7

Ce matin je me sens mieux. Mon petit « collapse » de ce week-end aura été une sorte de reboot. Après une dizaine de jours de musculation à ,peut-être ?, trop haute dose pour un type de mon âge et un excès de glucose pour Noël la « machine » aura dit « stop ! » Et ce matin, j'ai recommencé. Pas le glucose, ça je vais attendre un peu. Mais 2 heures de musculation et encore une couche cet après-midi... si je le sens bien. À côté de moi, qui vais mieux, le piaf ne va pas mieux du tout. Il est toujours tout cassé , explosé mais il respire encore. À peine, mais encore... pour combien de temps ?

Il fait un temps pourri mais je redescends faire un tour. On ne sait jamais, peut-être que le niveau du cours d'eau a changé et laissé apparaître un passage pour quitter cet endroit. En vrai, je n'y crois pas une minute mais... je ne suis pas super à l'aise à l'idée d'avoir ce piaf en train de crever sous le nez alors que je vais mieux, que je me sens mieux. Pourtant, j'ai l'intime conviction que je vis crever ici moi aussi. Crever dans mon Millevaux intérieur. Mais en vrai, st-ce que ce n'est pas ce qui nous attends tous, crever dans notre petit monde intérieur ? Et qu'est-ce que ça veut dire au juste ? Est-ce vraiment un problème finalement ? Ça l'est peut-être si on meurt dans son petit monde intérieur « avant » de mourir dans le monde physique. Ce serait une sorte de coma ou la folie ? Je ne sais pas. En tout cas, j'ai l'idée qu'un certain ordre des choses consiste à mourir dans on monde intérieur et « au monde » en même temps ! Ça me paraît mieux. Pour autant, si j'ai mon Millevaux à moi, Millevaux est un jeu et je le partage avec tous ceux qui y jouent. Alors, quitte à mourir ici je pourrais peut-être laisser, je ne sais pas, une lettre pour un prochain joueur ou mon prochain personnage... Je pourrais laisser là comme une bouteille à la mère, une bouteille à l'amer, une bouteille à la mer ! Avec mes regrets, mes doutes, mes conseils aussi quant à la façon de survivre ici. Mais en vrai, j'ai la flemme. Et j'ai d'autant plus la flemme que... à qui je pourrais bien m'adresser. Écrire une telle lettre, à qui et pourquoi ? Outre que j'ai la flemme, je trouve aussi que, finalement, ça sera comme m'accorder trop d'importance, vouloir qu'on se rappelle de moi mais... en vrai, je me fous complètement qu'on se souvienne de moi. Si je suis mort bah... je me fous d'à peu près tout. Donc, aucune importance qu'on se rappelle de moi, qu'on me trouve « important ». Si on doit se rappeler de moi, me trouver « important », qu'on le fasse maintenant, tant que je suis vivant. Et le problème ou un des problèmes ou une partie du problème c'est que ceux dont c'était le job de me faire sentir important ont complètement échoué. Il m'a fallu un moment pour en arriver à un constat de ce genre et, grâce à ce constat, aujourd'hui, je me fous totalement ! Ça n'a plus aucune importance. Donc, pas besoin de laisser une lettre à qui que ce soit. Et qu'on vienne pas me dire qu'une telle lettre pourrait être utile à qui que ce soit, je n'en croirais pas un mot. Mais peut-être qu'un prochain personnage plus fictif que celui-là aura plein d'idées et moins la flemme pour une telle lettre. Peut-être même qu'il aura un destinataire ?

E je m'en retourne vers mon nid avec, dedans, mon piaf en train de crever. Et sur le trajet, je croise un autre rocher. Lui aussi, il a des symboles cabalistiques gravés à sa base. Je ne comprends toujours pas ce que ça signifie, à part que c'est occulte et, peut-être parce que je me sens mieux, je me fous complètement de ne rien y comprendre. Mais j'aimerais bien reprendre l'escalade.

Le piaf n'a que l'air mort. Il ne n'est pas... encore. Il doit être une métaphore de quelque chose. Forcément. J'essaye de le nourrir un peu, vu que j'ai moi-même retrouvé un peu d'appétit après mon « collapse ». mais autant j'ai réussi à manger un peu, et avec plaisir. Autant lui ne veut rien avaler. C'est sûrement une métaphore de quelque chose. Je suis dans mon Millevaux intérieur, ces bois maudit domaine et avatar de la Mauvaise Mère. Ce piaf est quelque chose en moi qui est en train de crever dans ce petit monde en moi. Quelque chose se passe, est en train de se jouer et je ne saisis pas encore tout à fait quoi. Mais le jeu n'est pas fini.


Return Question : Quel succès récent avez-vous eu ? Et comment ce succès, aussi petit soit-il, a-t-il amélioré votre vie ?

Aucune idée ! Je n'ai pas l'impression d'avoir accompli quoi que ce soit récemment, ni même moins récemment, qui mérite qu'on le qualifie de succès !


Day 8

Double nuit doublement étrange. Double nuit car je vis en ce moment autant dans la réalité que dans mon Millevaux ludiconirique. Mais dans les deux, mon sommeil est bizarre, pas bon en tout cas, même si ça se « décale » dans la réalité mais... ce n'est pas satisfaisant. Insomnies, agitation, je comprends maintenant pourquoi. Le piaf écrabouillé a passé une partie de la nuit a faire du bruit et a se frotter contre moi, à faire du bruit. Ce piaf dans le jeu m'a empêcher de bien dormir dans la réalité...

Mais ça ne m'a pas empêcher de faire un (faux) rêve. J'ai rêvé de ce rocher avec les inscriptions occultes. Dans mon faux rêves, je savais les lire et, donc, comment quitter cet endroit. Sauf qu'à mes réveils, dans la réalité comme dans le jeu rêve, je ne me rappelais de rien... l'effet Millevaux ? Et je me dis que je vais mourir ici, dans le jeu... c'est dans le jeu que je me dis ça. En vrai, je me dis qu'actuellement, si je devais mourir, personne ne s'en rendrait compte. Alors, les pompiers interviendraient au bout de trois semaines après que mes voisins se soient plaints de l'odeur. Ces rochers m'apparaissent comme autant de clés incompréhensibles que des métaphores de la/ma prison. Clés que je ne comprends pas quand je suis dehors, prison quand je suis dedans ! Comme si le sens de ces gravures ne pouvait m’apparaître que si je les voyais de l’intérieur. Sauf que je dois être à l'extérieur pour les voir... Il faudrait quelque chose de passablement non-euclidien pour que je puisse les comprendre de dehors depuis l'intérieur. Que je puisse les comprendre dans le monde réel alors qu'il n'y a que dans le rêve et le jeu que mon moi fictif peut vraiment les comprendre... ou l'inverse. Ou alors, est-ce que c'est à mettre en lien avec un truc du genre du rapport qu'il y a entre le conscient et l'inconscient. La frontière est ténue et pourtant... que c'est difficile de comprendre ce que notre inconscient raconte. Surtout quand il ne veut pas être compris, car il croit nous/se protéger. Et il a peut-être bien raison de le croire d'ailleurs...

Et alors que réveillé et face à mon ordinateur j'explore en jeu ce que j'ai rêvé en jeu, je me retrouve planté, dans le jeu, face à l'image que j'ai vu en rêve dans le jeu. C'est exactement la même ! Des arbres morts et un marais boueux. Ce sont des symboles corrompues. Les arbres sont sensés incarner la sagesse, l'éternité, la vie, les racines. Là, ils sont morts, petits, rabougris. Et le marais, une version dégueulasse de l'eau, de la mer nourricière ?

Et pourtant, cette image me remplit d'espoir car elle me confirme que cette voie que je n'ai pas choisie est la bonne. Je n'ai pas choisi cette voie. On m'a jeté dessus. Je n'ai rien fait pour en changer car, au début, je n'en étais pas capable. Puis, par flemme ?, j'ai finalement décidé de laisser ce courant me porter et m'emmener là où il le souhaite car j'ai la conviction que quel que soit l'endroit où je me trouve je peux y apprendre quelque chose, sur le monde, sur moi. Et pour l'instant, ça marche. Donc, pourquoi m'user à vouloir changer de voie alors que, finalement, celle-ci est pas si mal ? Donc ouais, ce marais pourri avec ses arbres morts, c'est bien !

Je marche dans la boue et c'est bien mais... c'est dégueulasse ! On s'en fout plein les chaussures et les chaussettes. À marcher dans la boue, on a les pieds dans la merde ! Est-ce si grave que ça ? Non ! Surtout que je vois de nouveau ce rocher Lovecraft et je crois en comprendre enfin la métaphore. La double métaphore ! Les gravures sont une clé que mon intellect doit déchiffrer. Mais ce rocher est aussi un bloc que je dois escalader. Comprendre ce qui entoure la base puis me hisser tout en haut...

Mais d'abord, je dois comprendre. Je dois me pencher, me baisser, avoir les yeux au niveau de la boue dans laquelle repose ce rocher. Je dois avoir les pieds trempés dans la boue et avoir mal au dos d'être plié en deux avant de pouvoir me flinguer les bras et, surtout, les jambes en me hissant au sommet. Je ne peux pas procéder autrement car si je commence à grimper avant d'avoir réfléchi, d'avoir compris... je ne ferai pas marche arrière et ce sera trop tard.

Et merde.... je glisse ! Est-ce que c'est quelque chose qui m'entraîne sous la surface, sous la boue ? Dans la merde ? En tout cas, ça m'éloigne du rocher et de son sommet. Pourtant, je ne doute pas qu'il y a par-là aussi une sortie. Pas tout-à-fait la même que le sommet du rocher. Moins « aérienne », plus crade... peut-être la meilleure façon de sortir d'ici finalement. Comme une sorte de purge. Et je cherche le nom de ce type de la Bible qui s'est fait bouffer par une baleine et, ouf !, l'honneur est sauf. Son nom, Jonas, me revient avant que je ne fasse une recherche sur le net.

Et j'émerge plein de bout mais debout, recraché par le marais dégueulasse comme Jonas par sa baleine. Je suis si près du rocher mais pourtant son sommet m'est inaccessible. D'une part, je n'ai toujours pas percé le mystère de ses symboles. Et puis... je ne sais pas combien de temps je suis resté sous la boue mais ça m'a crevé. Alors, je fais demi-tour et je m'en retrouver mon piaf exploser qui a peut-être fini par vraiment crever. Comme moi aussi je vais finir par vraiment crever. Mais si j'ai trouver ce piaf explosé dans mon Millevaux intérieur, qui me trouvera, moi, tout explosé et plein de boue, dans son propre Millevaux intérieur ? Je n'ai aucune idée de comment sauver ce piaf. En vérité, je n'essaye même pas... alors, pourquoi attendre que quelqu'un essaye de me sauver moi ? Je n'ai que ce que ce que je mérite ?


Return Question : Quand avez-vous lutté et surmonté quelque chose ? Qu’avez-vous ressenti pour réussir après avoir travaillé si dur à elle ?

Plusieurs fois, dans le cadre de ma vie professionnelle, je me suis retrouvé confronté à des gens dont la violence, l'agressivité me rappelait celle de mon frère. C'était très dur. C'était très tentant de me mettre en arrêt, de flanquer ma démission. Je ne l'ai pas fait. Sur le coup, je pensais que c'était une forme de lâcheté de ne pas le faire. Au boulot, je ne me sentais pas non plus trop légitime à répondre à cette agressivité en miroir. Je pensais aussi que c'était une lâcheté, qu'invoquer une stature professionnelle m'offrait une « justification » à ma lâcheté. Pourtant, avec le recul, je suis plutôt satisfait de ces situations car elles m'ont permis de comprendre des choses autant sur moi que sur l'être humain en général. J'ai compris que c'était mes déterminismes psycho-sociologiques qui me poussaient à me retrouver dans des situations « connues » : la confrontation à l'agressivité sans pouvoir y répondre. Enfant, je n'avais pas le droit de répondre à mon frère. Il avait forcément raison. Toute résistance était inutile. Sur l'homme en général... et bien, au boulot, ce n'est plus le meilleur de l'homme qui s'exprime. Si ça a été le cas, ça fait longtemps que ça ne l'est plus. Aujourd'hui, le monde du travail, parce que les gens ont peur d'être mal vus du chef, de ne pas toucher leur prime etc., ne réveille plus que les mauvais côtés des gens, leur médiocrité. Mais j'ai aussi appris que, d'une certaine façon, j'étais peut-être finalement plutôt résilient comme garçon. L'air de rien, je ne lâchais pas le morceau. C'était dur mais je prenais mon poste, je le prends toujours. Je n'abandonne pas, ou rarement... même si je ne fais pas de vagues. C'est la mère qui fait des vagues. Moi, je préfère la montagne. Voilà, un roc... face à la mère déchaînée, serais-je finalement un roc, un rocher ? Un rocher qui ne cède pas et sur lequel, pour peu qu'on en ait compris les bases, on peut compter ?


Day 9

Je me réveille. Je n'ai pas rêvé. Le piaf écrabouillé aussi. Il n'est pas mort. Moi non plus. Sauf si je ne me suis pas réveillé et que je suis, finalement, en train de rêver justement. Mais laquelle de mes deux vies est le rêve. Celle où je tourne autour de ces rochers bizarres ou celle où je me lève le matin pour aller bosser quand la moitié des citoyens de mon pays est consignée à la maison à cause d'une pandémie ?

Quand je retourne dans le marais pour de nouveau étudier le rocher, je mets du temps à le retrouver. C'est comme s'il avait bougé. Ou je me suis perdu ? Nan ! Il a bougé ! Il est plus loin et... il recule quand je m'approche ! Ce rocher qui s'éloigne c'est quoi ? Mes perspectives de m'enfuir, de comprendre, de m'élever, qui s'enfuient. Et je me dis que j'ai loupé le coche. J'aurais dû mieux bosser sur ces inscriptions hier. Fuck la procrastination ! Maintenant, c'est trop tard. Je ne peux plus les atteindre. Je n'ai plus aucune chance d'escalader ce rocher. Je vais rester coincé ici avec ce piaf qui n'en finit pas de crever. Bon, je reviendrai demain. Peut-être qu'il aura de nouveau bouger et atterri là où je peux l'atteindre...

C'est le marais qui est le rêve. Je le sais car quand je suis rentré dans mon refuge, j'ai trouvé le piaf en train de se battre contre un truc dégueulasse, un rejeton de Shub-Niggurath. Un rejeton de la Mauvaise Mère... de « ma » mauvaise mère ? Mon frère donc ? Ce truc plein de tentacules puant la terre en putréfaction serait donc mon frère, lui aussi issu des entrailles de cette forêt de Millevaux dans laquelle je suis coincé ? C'est un rêve car je fonce dans le tas, ce que je n'aurais certainement pas fait en vrai. En vrai, je crois que je me serais tiré comme un gros lâche. Mais là, je fonce filer un coup de main à ce piaf qui, bien qu'explosé et agonisant, lutte contre mon taré de frère pour sauver ce qui lui reste de vie. Ce piaf est une métaphore. C'est moi ?

Alors, je saisis d'une branche et commence à frapper et mon frère de Shub-Niggurath finit par s'enfuir.

Et c'est tant mieux car la pression, l'adrénaline, retombe et je m'écroule. Et le piaf s'écroule aussi et rampe jusqu'à ce coller contre moi. Il va mourir, c'est évident, il le sait. On dirait qu'il ne veut pas mourir. C'est drôle car moi je sais que je vais mourir seul et, en vrai, je m'en fiche complètement. C'est juste pour les voisins que ça me dérange un peu car, au bout de trois semaines, ils vont être incommodés par l'odeur mais... comment je peux faire ? Le moment venu, je prends mon téléphone pour dire que ça y est je suis mort, qu'il y a plus qu'à venir chercher mon cadavre avant qu'il ne se décompose ?


Return Question : Quand avez-vous trouvé une force que vous ne saviez pas avoir ?

Aucune idée...


Day 10

Un bruit de branche qui casse me réveille. J'attrape un bout de bois et fais le tour du refuge au cas où mon « frère » serait de retour. Rien, personne... tant mieux. Quand je retourne dans mon refuge, je regarde le piaf. Il est au plus mal. Il n'y a que moi pour l'aider mais... comment puis-je l'aider alors que, comme le chante NIN, je n'arrive déjà pas à m'aider moi-même ? Et puis, franchement, dans cet état, qui pourrait vraiment le sauver maintenant ? Personne ! Si ce piaf éclaté est une métaphore de moi, je suis mal ! En fait, je me demande aussi si ce piaf n'est pas en train de crever à ma place. Un peu comme si, normalement, c'était moi qui devrait être être écrabouillé par terre. Mais comme il le fait à ma place, ça me permet de rester debout, et continuer... Combien de temps ? Qu'est-ce qui va se passer quand il ne tiendra plus et claquera ? Est-ce que je vais me reprendre tout ça d'un coup dans la gueule et me retrouver aussi, enfin ?, finalement ?, complètement explosé ? Et le piaf me regarde en haletant. Il y a un truc que je n'aime pas dans son regard. Il attend quelque chose... de moi. J'aime pas ça.

Je réfléchis et, si je veux sauver ce piaf, je dois faire une croix sur l'escalade du « rocher lovecraftien ». Quand bien même j'en déchiffrerais les runes, comment grimper avec le piaf dans une main ? Non, peut-être que la solution consiste plutôt à faire... le chemin inverse, à revenir de là où je viens. Un éventuel retour au source ne me rassure guère. Pourtant, pour ce piaf, j'ai envie de tenter le coup. À moins que ce piaf ne soit une excuse pour renoncer à escalader le « rocher lovecraftien » ? Je pense que ça doit être plutôt ça.

Retour au point de départ et... game over ? On dirait. Impossible de sortir de mon Millevaux Intérieur. Les rochers sont scellés ! Quelque chose a changé depuis mon arrivée et je ne peux plus sortir par-là. Celle-là, je m'y attendais pas ! Et je suis dégoûté. Mais surtout, je suis perdu. Je ne sais plus quoi faire. Je ne me sens pas la force d'escalader l'autre rocher. En plus, ça voudrait dire que j'abandonne le piaf. Que je m'abandonne moi-même ? J'ai l'impression que j'ai perdu, que je ne quitterai pas mon Millevaux Intérieur. Et si j'achevais le piaf ? Même ça, je ne peux m'y résoudre. C'est jamais agréable de perdre mais... je devrais avoir l'habitude pourtant.

J'abandonne... Je m'abandonne et j'abandonne le piaf. Je le dépose là, dans une fissure entre deux rochers dont le sommet se perd dans le brouillard. J'ai perdu. Je regarde ma main. Elle est couverte de sang.


Return Question :  ?Pour « quitter » Below, répondez s'il vous plaît à quelques questions. Vous pouvez écrire vos réponses dans votre journal, ou les dire à haute voix. Ou, si vous préférez, vous pouvez illustrer vos réponses. Rappelez-vous, c'est vous-même qui répondez à ces questions, pas votre personnage de Below.

• Qu’est-ce qui a résonné avec vous dans Below ?

Ce jeu aura été l'occasion de « psoer » certaines choses par écrit. Je mentirais si je disais que j'ai appris des choses mais c'était intéressant d'y réfléchir à nouveau par ce biais. La vraie question que je me suis posée était surtout de savoir si j'allais oser publier le compte-rendu de cette partie et... je crois bien que je vais oser. Je verrais bien s'il y a des conséquences mais j'en serais assez étonné.

• Qu’est-ce qui était très différent de votre expérience vécue ?

La boue, les bois... finalement, je suis un animal plutôt urbain et j'évite la boue. Finalement, concrètement, j'évite Millevaux et la Mauvaise Mère. Dans la vraie vie, il est très peu probable que j'échoue dans des bois.

• Comment avez-vous plus de contrôle dans votre vie que dans le jeu ?

Je n'ai pas l'impression de contrôler quoi que ce soit.

• Y a-t-il des aspects de la personnalité de votre personnage que vous souhaitez intégrer dans votre vie quotidienne ?

Et si j'avais fait l'inverse plutôt ?

• Y a-t-il des aspects de la personnalité de votre personnage que vous souhaitez laisser derrière vous ?

Non.

• Quelles sont les deux choses que vous envisagez dans un proche avenir?

Publier le compte-rendu de cette partie sur mon petit blog et jouer du theremin.



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